Journalistes : les conditions pour exercer la clause de cession telle que prévue à l’article L.7112-5 du Code du Travail au regard des dernières décisions jurisprudentielles – mars 2022

Rappelons que dans trois hypothèses énumérées à l’article L.7112-5 du Code du Travail, la loi autorise le journaliste en cas de résiliation de son contrat à son initiative à bénéficier de l’indemnité de licenciement telle que prévue à l’article L.7112-3 du code du Travail, soit un mois par année ou fraction d’année de collaboration des derniers appointements.

Ces hypothèses sont :

  • La cession du journal ou périodique ;
  • La cessation de la publication du journal ou périodique pour quelque cause que ce soit ;
  • Le changement notable dans le caractère ou l’orientation du journal ou périodique, si ce changement crée pour le salarié, une situation de nature à porter atteinte à son honneur, à sa réputation ou d’une manière générale à ses intérêts moraux.

Les dernières décisions rendues par la Cour de Cassation ou les Cours d’Appel de Paris ou Versailles  permettent de réaffirmer ou de préciser les grands principes directeurs en la matière.

● En termes de délai, la jurisprudence réaffirme qu’il n’y a pas de délai déterminé par la loi.

La jurisprudence de 2012 est confirmée : dans une affaire Dessaint contre le Groupe l’Express la Cour de Cassation avait précisé que « l’article L.7112-5 du Code du travail n’impose aucun délai aux journalistes pour mettre en œuvre la clause de cession. » (Ch. Soc. 16 février 2012, n°10-18.525 n°532 F-D)

En l’espèce, le journaliste l’avait exercé 8 mois après la cession.

La Cour de Cassation a confirmé cette position par un arrêt du 2 juin 2021, 19-20.588 (17 mois après).

Par un arrêt de la Cour d’Appel de Versailles de la 21ème Chambre du 3 mars 2022, n°20/00043, la Cour réaffirme qu’il n’y a aucun délai dans l’exercice de la clause. Confirmé  également par la Cour d’Appel de Paris dans un arrêt du 23 février 2022 Pôle 6 Chambre 3 pour un journaliste l’ayant exercé 9 mois après l’ouverture (n°18/12203).

● Néanmoins, la jurisprudence et plus particulièrement la Cour d’Appel de Paris dans un arrêt du 3 février 2022 après cassation n°20/05917, et dans le cas où une journaliste avait exercé sa clause 3 ans après l’ouverture de cette dernière, réaffirme qu’à défaut d’établir un lien de causalité entre sa décision et la cession de l’entreprise, la journaliste ne pouvait valablement se prévaloir de cette clause de cession.

La salariée avait motivée sa lettre par la cession et des changements dans la rédaction mais la Cour n’a pas relié ces derniers changements à la cession.

A rapprocher d’un arrêt du 23 février 2022 toujours de la Cour d’Appel de Paris mais d’une autre chambre 3 n°18/12203 qui accorde au salarié le bénéfice de la clause dès lors qu’en ajoutant une condition de délai l’employeur limite sans raison ni droit l’application de ce régime dérogatoire.